Dans la conscience collective guinéenne, l’ethnie a trop longtemps été une matrice identitaire surinvestie, un refuge émotionnel, mais aussi, hélas, un outil de division, de manipulation et d’exclusion. Il est aujourd’hui temps d’oser le courage politique, moral et intellectuel de tuer ce totem toxique. Non pas pour effacer nos appartenances culturelles, mais pour les remettre à leur juste place : celle d’une richesse plurielle, et non d’un poison national.
Dans notre pays, l’ethnie est souvent la première question, le premier réflexe, le premier soupçon. Elle enferme les Guinéens dans des cloisons invisibles mais bien réelles, où le mérite est filtré par l’appartenance, où la solidarité est conditionnée par la ressemblance, où l’ambition nationale est subordonnée aux calculs communautaires. Cette prison mentale ne peut plus durer.
L’histoire récente de la Guinée regorge d’exemples où les clivages ethniques ont été instrumentalisés par les élites comme arme politique pour se maintenir au pouvoir, diviser pour régner, dresser les uns contre les autres, pendant que les véritables enjeux que sont l’éducation, la santé, l’emploi, la justice – restent en friche. Tant que l’ethnie continuera de dicter les votes, de guider les nominations, d’orienter les colères ou les loyautés, la République restera une promesse non tenue.
Il est temps de construire une Guinée au-dessus des appartenances où l’on est citoyen avant d’être peul, malinké, soussou, forestier. Une Guinée où l’on gouverne pour tous, où l’on choisit ses leaders pour leur vision et non pour leur nom, où l’on célèbre la diversité sans la redouter. Tuer l’ethnie, c’est refuser qu’elle soit l’alpha et l’oméga du destin guinéen. C’est replacer l’intérêt national au sommet de la hiérarchie des priorités.
Tuer l’ethnie, c’est refuser de transmettre à nos enfants les rancunes de nos aînés. C’est revoir nos discours, nos réflexes, nos partis politiques, nos alliances sociales. C’est accepter le débat d’idées plutôt que la bataille d’identités. C’est aussi valoriser ceux qui portent une parole inclusive, qui rassemblent, qui apaisent. Ce combat culturel et politique doit figurer dans les projets de société de tous les acteurs politiques dont la mission fondamentale est la formation et l’éducation des popultions pour un changement de comportements.
La Guinée ne s’élèvera pas tant que ses fils et filles resteront prisonniers d’un communautarisme stérile. Il faut tuer l’ethnie, non pas les ethnies pour que naisse enfin une conscience nationale mature, libre, sereine. Le chemin est long, mais nécessaire. C’est à ce prix que nous pourrons espérer bâtir une Guinée unie, stable et prospère, où la fraternité ne s’arrête pas aux frontières du sang ou du village. Il s’agit de mourir à l’ethnie pour renaître en nation. Car seule une Guinée détribalisée pourra entrer, fière et forte, dans le concert des nations véritablement libres.
Que Dieu bénisse la Guinée et les Guinéens.
Honorable Cheick TRAORE
Secrétaire Exécutif National de la Synergie GMD25